Comment sortir des liquidités d’une société ?

La charge fiscale qui pèse maintenant sur les structures économiques et les contribuables est devenue telle qu’aucune mesure ne devrait être prise sans avoir, à l’avance, réfléchi et stratégiquement à une méthode potentielle d’optimisation.

Si, comme la plupart des dirigeants d’entreprise, le sort de l’excédent de trésorerie dans votre structure est au cœur de votre stratégie de gestion, vous devriez tenir compte de toutes les éventualités qui sont à votre disposition.

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Par souci de clarté, nous proposons d’étudier trois arbitrages basés sur des exemples chiffrés.

Note : quelle que soit la situation et afin de permettre la meilleure comparaison possible, nous comptons sur un flux de trésorerie excédentaire de 750.000€ libéré par une société soumise à l’impôt sur les sociétés.

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Arbitrage 1 : Comment distribuer ? Dividendes ou réduction du capital ?

Cet arbitrage s’adresse essentiellement aux cadres supérieurs qui démontrent un besoin ponctuel de revenus supplémentaires malgré la question de savoir s’il est avantageux ou non de distribuer (voir arbitrage #2).

Le choix à faire concerne la distinction entre les différents régimes fiscaux, à savoir entre le prélèvement forfaitaire unique (PFU) et l’impôt sur le revenu (IR) :

  • Les dividendes, d’une part,
  • Les gains en capital, d’autre part.

Pour être précis, nous nous référons, dans la seconde possibilité, au cas d’une réduction de capital par l’acquisition de ses propres titres par la société, une opération soumise, depuis la loi de finances modificative pour 2014 (article 88) et une décision du Conseil constitutionnel du 20 juin 2014, au régime du capital meuble gains.

Depuis lors, le régime des gains en capital s’applique donc à tous les rachat de titres détenus par un associé en impôt sur le revenu.

Afin de rendre la lecture aussi évidente que possible du tableau comparatif, il est nécessaire de rappeler rapidement les régimes fiscaux concernés.

Régime fiscal sur les dividendes Régimes fiscaux sur les plus-values
Application à l’échelle progressive des redevances IR et sociales (CSG/CRDS)
Application d’une réduction unique de 40 % seulement en vertu de l’APM Application d’une allocation de détention, uniquement en vertu de la RI, de :

  • 50 % lorsque les titres étaient détenus pendant au moins deux ans mais pendant moins de 8 ans,
  • 65 % lorsque des titres ont été détenus pendant plus de 8 ans
La CSG (cotisation sociale généralisée) forme un crédit d’impôt de 5,1% de son montant pour l’année suivante
Compte tenu du montant distribué, le contribuable sera redevable de la contribution exceptionnelle sur les revenus élevés (CEHR) d’un montant de 4% ou 6%

Nous comparerons donc le montant net reçu après impôts d’une distribution similaire de 750.000€.

Dividendes Gains en capital*
Montant distribué 750 000 000€
Réduction 300.000€ (40%) 375 000€ (50%) 487 500€ (65 %)
Base imposable 450.000€ 375 000€ 262 500€
**Impôts sur l’IRS** 202 500€ 168 750€ 118,125€
Impôt sur PS (15,5 %) *** 116 250€ 116 250€ 116 250€
Contribution exceptionnelle sur un revenu élevé (4%) 30 000€ 30 000€ 30 000€
TOTAL 348 750€ 315 000€ €264 375
Crédit CSG année suivante (5,1%) — 5,929€ — 5,929€ — 5,929€
Impôt total réel (par compensation) 342 821€ 309 071€ €258 446
PERCU NET 407.179€ 440,929€ 491.554€
Taux d’efficacité 54,3% 58,8% 65,5%

*dans le cas des gains en capital, nous considérerons les deux déductions potentielles en fonction de la durée de la détention (50 % ou 65 %) ** Hypothèse de tranche d’imposition marginale de 45 % ***rappel : aucun abattement applicable pour le calcul des cotisations sociales dues (assiette imposable : 500 000€)

Il semble donc évident que l’hypothèse d’une réduction de capital permet au partenaire de recevoir un gain net plus important (et encore plus important s’il détient les titres depuis plus de 8 ans).

Toutefois, il ne faut pas exclure que cette utilisation puisse être considérée comme ayant un but exclusivement fiscal et pourrait donc constituer un « abus de droit ».

Afin d’éviter au mieux les risques d’une telle qualification, il peut être souhaitable de combiner les deux stratégies au fil du temps, à savoir : la distribution des dividendes pendant quelques années (de préférence les premières années d’activité), puis procéder à une réduction de capital isolée l’année suivante.

Arbitrage #2 : Ne rien faire ou distribuer

Ce deuxième arbitrage vise, en fait, à déterminer s’il peut être financièrement plus efficace de capitaliser l’excédent de trésorerie au sein de la société (aussi appelé « encapsulation ») et de les distribuer aux associés, ou, inversement, de distribuer immédiatement aux associés afin de leur permettre de capitaliser sur les fonds collectées.

Dans les deux cas, la période de financement envisagée est de 15 ans.

*Notez que la distribution aux associés peut être comprise de deux façons : une distribution conventionnelle de dividendes ou une distribution résultant d’une réduction du capital de la société par rachat de ses propres titres (cf. arbitrage n°1).

La première situation conduira à :

  • Pour être assujetti à des gains capitalisés, l’impôt sur les sociétés (IS), au cours de la période d’encapsulation
  • L’imposition des revenus ensuite distribués, sur l’impôt sur le revenu et les prélèvements sociaux entre les mains des associés (régime de dividendes ou de plus-values)

La deuxième situation n’implique que l’imposition de l’APM et de la FP :

  • Pour les dividendes ou les gains en capital pour le montant distribué
  • Au taux de 7,5 % (prélèvement libératoire forfaitaire) sur les bénéfices alors capitalisés (contrat de capitalisation)

Le tableau suivant permet une comparaison éloquente des deux situations (les étapes liées à la distribution aux partenaires étant doublées depuis la possibilité d’une distribution conventionnelle de dividendes ou d’une réduction du capital).

Encapsulation Immédiatement
Dividendes Réduction du capital (PV mobile) *
Excédent de 750.000€
Distribution 0€ 750 000 000€ 750 000 000€
Ablatments 300.000€ (40%) 487 500€ (65 %)
Base imposable 450.000€ 262 500€
**Imposition au barème de l’IR** 202 500€ 118,125€
Imposition aux PS (15,5 %) *** 116 250€ 116 250€
Contribution Exceptionnelle sur les hauts revenus (4%) 30 000€ 30 000€
L’IMPOT TOTAL 348 750€ €264 375
Net disponible 750 000 000€ 401 250€ 485 625€
Capitalisation des réserves 750 000 000€
Contrat de capitalisation 401 250€ 485 625€
Taux de rendement brut 3%
Taxation du rendement Taux est : 33.33% Taux des PS : 15.5% **
Taux de rendement net 2% 2,54%
Valeur future des réserves (au distributeur) 1 009,416€
DISTRIBUTION 1 009,416€
Divisse PV mobileres
Amattements 403.767€ 656,120€
Base imposable 605.649€ 353.296€
Imposition au Barème de l’IR** 272 542€ 158.983€
Imposition aux PS (15,5 %) *** 156.459€ 156.459€
Contribution Exceptionnelle sur les hauts revenus (4%) 40,377€ 40,377€
L’IMPOT TOTAL 469.378€ 355.819€
Net disponible 540,038€ 653.597€
Valeur future du contrat 584.113€ 706.941€
Plateau taxique*** 173.663€ 212.116€
Taxe de libération (7,5 %) 13,025€ 15.909€
NET DISPONIBLE 540,038€ 653.597€ 571.088€ 691.032€

* Hypothèse de déduction maximale de 65 % **cas d’un contrat de capitalisation investi dans des fonds en euros ***montant d’intérêt — allocation de 9.200€ pour un couple marié

La comparaison des deux situations conduit au fait que la capitalisation au sein de l’entreprise ne permet pas de réaliser un meilleur gain net que dans le cas d’une distribution immédiate aux partenaires suivie de la capitalisation privée.

Arbitrage #3 : Démembrer ou ne pas se démembrer ?

Cette troisième et dernière hypothèse est moins classique que les deux précédentes.

Il s’agit d’un démembrement de biens immobiliers à haut rendement (7 à 8 %) entre la société d’usufrucarie temporaire, d’une part, et le gérant du propriétaire nu, d’autre part.

À des fins de comparaison, nous considérerons que l’enveloppe disponible de l’entreprise est 750.000€.

Dans ce cas, le gestionnaire (et voici le point critique principal de cette hypothèse), doit, pour sa part, avoir également des disponibilités personnelles immédiates ou contracter un prêt dans le but d’acquérir la propriété nue.

La logique est alors classique, puisque dès l’extinction de l’usufruit temporaire détenu par la société, le gérant deviendra propriétaire à part entière, sans droits ni taxes, de l’immeuble pour une valeur nettement supérieure au montant initialement investi .

L’ensemble du défi est de trouver un bien dont le loyer à percevoir sur une durée à déterminer permettra à l’entreprise d’investir les 750.000€ disponibles sur la base de l’actualisation des loyers futurs sur la période choisie (en fonction d’un rendement donné), ce qui en fait est loin d’être facile…

En outre, nous devons attirer votre attention sur les autres points délicats d’un tel arrangement, qui dépend, à la fois du rendement et de l’évolution des loyers au fil du temps, mais aussi et surtout, de la possibilité de louer, sans discontinuité, la propriété acquise.

Cela ignorant le fait, rappelons-nous, qu’il ne peut être réservé qu’à une certaine catégorie de cadres qui seraient en mesure d’assumer financièrement l’acquisition de la seule propriété.

Solde

La principale leçon de cet article est de démontrer que, dans un but donné, différentes stratégies peuvent être envisagées.

L’étude de ces diverses décisions de gestion et/ou d’investissement conduisent à insister sur l’importance de procéder à des arbitrages réguliers en fonction de la situation personnelle et professionnelle de chaque individu et de la législation en vigueur.

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